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A quelques jours d’un sommet social convoqué par le Président de la République et très attendu, François Hollande et Jean-Luc Mélenchon rencontrent chacun leur tour les organisations syndicales. L’occasion de revenir sur un débat qui a opposé les deux candidats en juin dernier : la conception du droit social et la hiérarchie des normes. Deux orientations qui pourraient s’avérer très différentes. Par Maxime Prieto.
Entre François Hollande et Jean-Luc Mélenchon, on connaissait un désaccord majeur sur l’âge de départ à la retraite. Le candidat du Front de Gauche souhaite rétablir le droit à la retraite à 60 ans à taux plein, comme indiqué dans le programme L’Humain d’abord. Le candidat socialiste est plus nuancé puisqu’il propose un retour au droit à l’âge légal de départ à la retraite de 60 ans pour les personnes ayant commencé à travailler à 18 ans et ayant suffisamment cotisé depuis pour prétendre à une retraite à taux plein. Une proposition en-dessous de ce que préconisait le Parti Socialiste dans son programme mais désormais clairement assumée par son candidat à la présidentielle.
Cependant, il semblerait que la vision de François Hollande de la démocratie sociale soit de plus en plus éloignée de celle défendue par Jean-Luc Mélenchon et le Front de Gauche.
Etrangement peu relayée par les journalistes, la tribune de François Hollande publiée dans Le Monde le 14 juin 2011 avait ouvert un débat à gauche sur la conception du droit social et la hiérarchie des normes dans notre modèle républicain. «Il s’agirait désormais de reconnaître un domaine à cette même négociation collective, en précisant son périmètre comme son champ d’intervention, et en conditionnant la conclusion d’accords au respect des règles majoritaires. Concrètement, le gouvernement et le Parlement seraient juridiquement liés par le contenu de conventions signées entre partenaires sociaux sur des sujets bien précis et avec la vérification des mécanismes de représentativité.» Autrement-dit, celui qui a été depuis désigné comme le candidat socialiste, souhaiterait modifier la constitution afin d’inverser la hiérarchie des normes telle qu’elle a été définie depuis la Révolution française : le contrat est supérieur à la loi.
Jean-Luc Mélenchon avait alors réagi dans le journal La Tribune et sur son blog, pour dénoncer une régression terrible, digne des revendications du Medef : «au mépris de l’institution républicaine, ce point de vue méconnait aussi la réalité de notre temps. Le contrat est basé sur la négociation d’un rapport de force. Aujourd’hui celui-ci est dominé par la pression dérégulatrice de la mondialisation. Laquelle pousse à la baisse du coût du travail en jouant sur l’individualisation des rapports sociaux et le retrait de la régulation législative. Dans ce contexte l’obligation d’en passer, pour finir, par le vote de la loi est un appui essentiel pour les salariés et leurs syndicats. Mais aussi pour les petites entreprises qui ont avec le législateur un recours contre les abus de position dominante des grands groupes qui leur sous traite le travail de surexploitation. Ôter ce recours c’est méconnaitre l’histoire du droit social en France qui n’a cessé de vouloir l’affranchissement du travail de la logique du contrat.»
Et avec ironie, le candidat du Front de Gauche s’était amusé de constater que l’ancien ministre ultra-libéral Alain Madelin apportait son soutien à l’initiative du député corrézien. « Pour cela, écrit Alain Madelin, François Hollande propose d’inscrire une véritable autonomie normative pour les partenaires sociaux dans la Constitution. En clair, donner force de loi aux contrats conclus sous certaines conditions par les partenaires sociaux. La proposition n’est pas nouvelle. Longtemps défendue par les libéraux, elle a été au cœur de la « refondation sociale » esquissée en 1999 par les partenaires sociaux. C’est dire qu’elle dépasse aujourd’hui les clivages politiques. Son retour sur la scène politique est bienvenu car la refondation du droit social est nécessaire. »
Le débat n’avait pu aller plus loin, faute de relais médiatique. Sous la pression de syndicalistes, François Hollande aurait quelque peu revu sa volonté d’ «autonomie normative des partenaires sociaux». Son approche reste néanmoins opposée à celle de Jean-Luc Mélenchon, qui tout en souhaitant améliorer la démocratie sociale, continue de défendre l’ordre public social républicain. Les prochaines semaines de campagne présidentielle offriront peut-être l’opportunité aux deux concurrents de gauche de confronter leur vision. A gauche, le débat d’idées est attendu.
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